La Démocratie: une escroquerie pour l’Afrique?

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En 1990, période inaugurale des conférences nationales en Afrique, les sociétés civiles et les acteurs politiques demandaient le retour au pluralisme politique mais surtout, revendiquaient la DÉMOCRATIE.

Cette démocratie (représentative) a été longtemps considérée comme la formule magique, la solution pour tous les défis d’un continent en pleine transition : l’Afrique.
Pourtant plus de cinquante ans plus tard, le constat est clair, un echec cuisant de la démocratie sur le continent noir.

Cela dit, Il faut souligner d’entrée que dans l’entendement du monde occidental, lorsqu’il est fait allusion à la démocratie en Afrique, il s’agit en réalité de désigner une théorie politique appartenant à un monde d’une infériorité institutionnelle. En fait la démocratie est ce bloc de valeurs occidentales proposées aux africains pour rendre leur organisation sociale ‘’civilisée’’.

La démocratie a pour sous-jacent : la volonté de la majorité, le triomphe de l’individu sur le groupe, la promotion des droits de l’homme, le libéralisme, la souveraineté.
Cette démocratie est aujourd’hui en crise en Afrique parce que les africains ne vivent pas la souveraineté, la volonté du plus grand nombre n’est pas respectée, les gens sont détenus arbitrairement mais surtout parce que le mot démocratie n’intéresse pas beaucoup les africains.

Il est donc maladroit, inexacte et peut-être faux de voir en certains facteurs tels que,  l’ethnie, le tribalisme et la tradition, les seules causes de l’échec de la démocratie et de l’Etat en Afrique.

En fait les africains ne luttent pas pour le vocable ‘’démocratie’’. Ils luttent car ils veulent être en bonne santé, avoir trois repas variés par jour, ils souhaitent bénéficier de façon permanente de l’électricité et de l’accès à l’eau, bénéficier d’une école de qualité et vivre dans un environnement où la solidarité est une réalité. Les africains veulent surtout évoluer dans leur propre paradigme, vivre dans leur propre système.

Il n’a jamais été question de demander une alternance pour une alternance. Si les Africains ne demandaient que l’alternance et rien que l’alternance, tous les africains iraient vivre en Afrique du Sud ou en Tanzanie car là-bas, les dirigeants se succèdent à la tête de l’Etat.
Il faut donc sortir de cette hypocrisie politique qui consiste à ramener la lutte de plusieurs générations à un simple changement de figure à la tête de l’Etat au nom d’un concept, la démocratie.

En Centrafrique, de Bokassa à Dako, de Patassé à Bozizé ou encore de Djotodia à Touadera, le peuple n’a pas cessé un seul instant de souffrir.

Aujourd’hui, l’alternance est utilisée par les ex puissances coloniales pour faire du chantage aux peuples africains et pour établir la surenchère aux hommes politiques africains. Ceux qu’ils font fi d’ignorer c’est que leur mode opératoire appartient au système que les africains rejettent.

Ce que les africains combattent , c’est un système de valeurs marqué par la corruption, la promiscuité, la violence comme moyens d’exercer la politique, l’exploitation du sous-sol africain par des multinationales, qui n’ont que de l’indifférence face à la misère des populations africaines (Mouvement pour la survie du peuple Ogoni), la confiscation du pouvoir par des clans, des familles.

En réalité, l’Etat en Afrique n’est pas décadent, c’est plutôt l’expérimentation d’un modèle occidental sur un environnement non approprié (l’Afrique) qui a échoué. Cette projection du projet politique européen sur notre continent a échoué parce qu’il ne visait pas à faire de l’Afrique une terre paisible et aujourd’hui on voit bien que l’incapacité des casques bleues en RDC, est l’expression du manque de volonté d’une ‘’communauté internationale’’. De même que l’immobilisme au sommet de l’Etat au Congo, au Gabon et Togo témoigne de l’imposture d’un système, une escroquerie vendue comme solution miracle à un peuple meurtrie depuis le VIème siècle.

L’éloge fait à la démocratie malienne par exemple montre toutes ses limites.  Si l’on peut se féliciter de l’alternance au sommet de l’Etat, que dire de la sécurité ? De la stabilité, de la solidarité nationale, de la prévoyance sociale ou encore de la redistribution des richesses pour le peuple malien ? Un échec.

On peut en dire de même pour le Nigéria. L’alternance au sommet de l’Etat, de Obasanjo à Yaradua, de Yaradua à Jonathan et de Jonathan à Buhari n’a pas empêché les massacres inter ethniques, les injustices envers les peuples Ogoni et la terreur Boko Haram.

Quant à nos constitutions, c’est-à-dire, nos règles de vie en société, elles sont souvent non écrites en Afrique précoloniale. Cela ne fait pas du monde africain un monde sans principes fondamentaux, la preuve, en regardant la charte du Mandem de 1236, on voit bien que les sociétés africaines ont des principes fondamentaux.

Mieux, l’avènement de Soundjata Keita à la tête de l’empire du Mali, symbolise une renaissance, ce qui suppose que les principes défendus par Soundjata Keita ne sont nullement nouveaux. Ce sont des principes inhérents aux rapports sociaux en Afrique, lesquels ont été interrompus d’abord par l’arrivée de l’Islam au VI ème siècle, ensuite par l’arrivée du christianisme au XV ème siècle.

Soundjata vient donc rétablir les principes africains dans les rapports sociaux, comme un article de la charte l’indique : << une vie n’est pas plus ancienne ni plus respectable qu’une autre vie, de même qu’une autre vie n’est pas supérieure à une autre vie >> ; il est clair que le principe selon lequel, tous les hommes naissent égaux, n’est pas issu de la révolution française, en tout cas en Afrique, c’est un principe qui a toujours existé.

De la même manière, il faut trouver dans le constitutionnalisme africain, l’absence de l’arbitraire et de toute dérive autoritaire et la présence d’un pluralisme
L’Afrique doit se retrouver en faisant revivre ses religions qui sont d’une part un pilier de sa constitutionnalité. L’expression même de son cheminement civilisationnel. A cela s’ajoute un principe constitutionnel clé, celui du consensus politique. Que ce soit chez Les Bagandas, les Zoulous, les Nzebis, qu’il s’agisse de société acéphale ou mono Céphale, le consensus et la collégialité priment. Il n’existe pas de compétition politique génératrice d’antagonisme.

Dans le constitutionnalisme africain, la justice n’a pas vocation à punir mais plutôt à garantir l’unité sociale. Elle est assurée par des juges expérimentés (les vieux) ; c’est une heureuse coïncidence car les juridictions constitutionnelles européennes, dont l’existence est récente, exigent aussi de leurs juges une certaine expérience. Il s’agit ici d’un modèle totalement opposé au modèle dominant qui nous sert de code. C’est pour cette raison que les prisons en Afrique ne parviennent pas à faire des hommes, des citoyens meilleurs car la prison est l’instrument d’un droit importé.

L’Afrique précoloniale c’est <<un système transparent d’équilibre des pouvoirs, d’État de droit et de prévention des abus de pouvoir par les dépositaires de l’autorité publique>>.
Les principes fondamentaux de la société africaine repose sur les valeurs traditionnelles, les croyances et les normes culturelles : voilà les sources des constitutions africaines. Ces valeurs empêchaient toute dérive autoritaire car le Chef était tenu de s’y soumettre puisque ce dernier était soumis au contrôle d’un conseil tel que l’Oyo Mesi (chez les Yoruba).
Il existe donc bel et bien une identité et une organisation politique africaine. Dit autrement, l’Afrique possède sa propre démocratie. Cette démocratie n’est pas morte, ses principes et sa pratique se trouvent dans nos campagnes, dans nos villages. Elle réside dans le pragmatisme.

Une fois de plus, les africains, particulièrement les nouvelles générations n’attendent plus rien de l’illusion démocratique, elles veulent des actes ; une protection de l’Etat, l’instruction, un travail digne, une santé de qualité, et l’épanouissement. Elles veulent arrêter de prendre des pirogues pour chavirer dans les eaux de la méditerranée.

Il est temps pour l’Afrique, la nouvelle génération de faire le choix de l’audace, repartir vers nos valeurs et les ériger en modèle de gouvernance, pour une Afrique libre, digne et prospère.

Analyse.

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