Guinée-Conakry, la constitution de la rupture ?

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En dépit des manifestations qui ont secoué la ville de Conakry ces dernières semaines pour dire non à l’idée d’un referendum, le projet de nouvelle constitution voulu par le Président Alpha Condé semble toujours d’actualité. En effet, certaines rédactions se sont procurées un document qui vraisemblablement  , est le nouveau texte constitutionnel.

A la lecture de celui-ci, sans langue de bois, on peut dire qu’il s’agit d’une constitution révolutionnaire, nationaliste, panafricaine et innovante puisqu’elle vise à faire entrer la Guinée dans l’ère des nouvelles technologies.

D’abord, la nouvelle constitution élargit son bloc de constitutionnalité en y intégrant la charte de la renaissance culturelle africaine du 26 janvier 2006 et la convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination raciale du 7 mars 1966, entre autres.

Ensuite, elle opère une rupture avec le passé car elle suit l’exemple rwandais en faisant de l’anglais, sa seconde langue nationale à côté du français.  Mais elle reconnait aussi les particularismes locaux puisqu’elle protège  la science et les technologies  ainsi que les plantes et les semences indigènes.

En son article 4, cette nouvelle loi fondamentale entend rendre plus effective la présence des femmes au sein des administrations à hauteur d’au moins 30%.

Puis, à l’instar de plusieurs autres constitutions africaines, elle fait du dialogue et du consensus, les clés de la résolution des conflits (article 4 alinéa 7), offrant ainsi au juge suprême les prérogatives de gardien et artisan de la paix et de la stabilité.

Le constituant guinéen ne s’arrête pas là, il veut instaurer une laïcité positive en encourageant les citoyens à proférer leur foi religieuse.

Par ailleurs, la nouvelle loi fondamentale en ‘’gestation’’ sacralise la citoyenneté guinéenne en interdisant systématiquement la déchéance de la nationalité guinéenne d’origine (article 11) ; quand on nait guinéen, on le demeure.

A travers ce nouveau texte, la Guinée se veut une terre d’accueil ; dans la mesure où, en son article 14, il garantit le droit d’asile à quiconque se sent persécuté dans son pays d’origine ou ailleurs.

Mieux, ce texte encadre la liberté d’expression en la faisant sortir de toute forme d’amalgame puisque la liberté d’expression ne s’étend pas à la promotion de la haine, de la violence et de l’ethnisme (article 18, alinéas 1, 2, 3).

Il faut ajouter que cette constitution souhaite renforcer l’initiative citoyenne en érigeant le droit de pétition (article 21).

On y relève  plusieurs dispositions originales notamment au niveau du titre III section 2 ; si le nouveau texte est adopté, il sera désormais impossible de faire des transactions relatives aux ressources naturelles sans ratification du parlement.

Quant à la question houleuse des mandats présidentiels, la nouvelle constitution prévoit deux mandats successifs non renouvelables pour un Président en exercice.

Seul hic, la nouvelle constitution ne prévoit pas de Cour constitutionnelle, bien au contraire, elle revient à l’ancien modèle, lequel offre des prérogatives de juge électoral et de contrôle de constitutionnalité des lois à une Cour Suprême (article 153 alinéas F1, L7).

En définitive, le constituant guinéen semble vouloir tenir compte des évolutions sociale, politique et environnementale actuelles, il se démarque du mimétisme français en matière d’organisation de la justice constitutionnelle et crée une sorte protectionnisme économique. Sans doute, l’obsession de la création d’un modèle ‘’ Made in Guinée-Conakry’’.

Whylton Consulting.

 

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